Vos poèmes préférés

Invité

J'ai envie d'en partager un, moi aussi (très chouette idée que de partager des poèmes aimés !).

J'aime beaucoup de poètes, Emily Dickinson, Shelley, Keats... mais je commence avec mon très cher Dylan Thomas.
De Thomas, j'aime tout.
Sa violence, sa rage sous-jacente, ses rêveries sur la mort, l'absence, le désespoir, cet incroyable appétit de vivre, cette faim de tout, la force de la Nature et de l'imagination...
J'ai toujours eu de quoi me nourrir avec ces mots-là.
"Après la première mort, il n'y a rien d'autre", disait-il et alors, tout est dit.

Le poème que je vous propose, vous le connaissez peut-être : N’entre pas sans violence dans cette bonne nuit (Do not go gentle into that good night) qui date de 1951.
Si d'aventures vous ne le connaissez pas, j'espère qu'il vous "bousculera" autant qu'il me "bouscule" :

N’entre pas sans violence dans cette bonne nuit

N’entre pas sans violence dans cette bonne nuit,
Le vieil âge devrait brûler et s’emporter à la chute du jour ;
Rager, s’enrager contre la mort de la lumière.

Bien que les hommes sages à leur fin sachent que l’obscur est mérité,
Parce que leurs paroles n’ont fourché nul éclair ils
N’entrent pas sans violence dans cette bonne nuit.

Les hommes bons, passée la dernière vague, criant combien clairs
Leurs actes frêles auraient pu danser en un verre baie
Ragent, s’enragent contre la mort de la lumière.

Les hommes violents qui prient et chantèrent le soleil en plein vol,
Et apprenant, trop tard, qu’ils l’ont affligé dans sa course,
N’entrent pas sans violence dans cette bonne nuit.

Les hommes graves, près de mourir, qui voient de vue aveuglante
Que leurs yeux aveugles pourraient briller comme météores et s’égayer,
Ragent, s’enragent contre la mort de la lumière.

Et toi, mon père, ici sur la triste élévation
Maudis, bénis-moi à présent avec tes larmes violentes, je t’en prie.
N’entre pas sans violence dans cette bonne nuit.
Rage, enrage contre la mort de la lumière.

Invité

C'est très joli, mais j'avoue que le sens m'échappe un peu...

Invité

C'est vrai qu'il peut être un peu "obscur", les clefs ne sont pas données à la première lecture car tout surgit de l'inconscient; c'est le foisonnement intérieur avant tout...
Dans ce poème, il parle tout simplement de la mort (son père était mourant et presque aveugle au moment où il a composé ce poème - d'où, par exemple, les jeux sur lumière / nuit) et de la rage et la hargne nécessaires, de la colère bienfaitrice (la colère n'étant pas exclusivement synonyme de mauvais). Je suppose que c'est aussi un cri, un appel, il veut un dernier sursaut du vivant à l'approche de la mort qui se traduirait par un geste du père envers le fils.
En général, je n'aime pas trop m'expliquer les choses, les poèmes, etc., mais je pense que ces petits détails - la mort prochaine du père - sont intéressants à savoir.

Un autre que j'aime (les parents de Thomas ont eu un enfant décédé en bas-âge, petite précision).

Moi, le premier prénommé.

Moi, le premier prénommé
Je suis le fantôme de cet
Ami anonyme, sans prénom
Qui écrit les mots que j’écris
Dans une chambre tranquille
Dans une maison imbibée d’envoûtement ;

Je suis le fantôme de cette maison
Remplie des langues et des yeux
D’un fantôme sans tête
Que je crains pour toujours
Jusqu’à la fin anonyme.

Invité

Merci des explications pour le premier poème, Foxglove Smile

Le deuxième que tu mets m'angoisse, je ne sais dire pourquoi...

Invité

You're welcome. Smile

Et honnêtement, je suis heureuse que ce poème provoque ce sentiment d'angoisse. Alors non, je ne veux pas dire par là que je suis bien contente que cela t'angoisse, loin de moi cette idée !
lol!

Par là, je veux dire que tu as ressenti une émotion (même si inconfortable) et c'est le plus beau compliment que l'on puisse faire à une oeuvre ! Et à vrai dire, je suis dans le même cas que toi, ce poème est inconfortable. Comme si l'enfant Premier Né, ce petit mort en bas-âge, ne cessait de hanter la demeure familiale, qu'il observait les membres de sa famille mais voilà... au bout d'un moment, on se demande qui est vraiment le fantôme ; le mort ou le vivant ? Qui est vraiment celui qui n'a pas de nom ? (Il peut être intéressant également de noter que Dylan Thomas, alors enfant, a toujours eu l'impression d'avoir été mis au monde en remplacement du Premier Né.)

Invité

L'un de mes poêmes préférer... et le seul sur lequel j'ai versé des larmes. Et l'un de miens. J'en ai pleuré comme un bébé quand une amie la mise en chason.

J'en ai encore les yeux qui pique juste d'en parler.

Sujet: Re: Vos poèmes préférés Lun 19 Nov 2012 - 12:52

@Sinoke: Tu veux dire que tu parles d'un poème que tu as écrit?

Sujet: Re: Vos poèmes préférés Mar 20 Nov 2012 - 15:23

Dors, dors, petit ange, et rêve de la mort,
Dors, dors, petit ange, demain tu seras mort,
Dors, dors, petit ange, demain tu ne vivras pas,
Dors, dors, petit ange, demain je serai là,
Dors, dors, petit ange, dors et rêve de moi.

DARK SANCTUARY

Invité

C'est très triste, ça, Draven... Mais c'est très joli.

Invité

Disciplus Simplex a écrit:: @Sinoke: Tu veux dire que tu parles d'un poème que tu as écrit?

Effectivement Smile

Il y a 30 il nous quittait ...
Il n'y a pas d'amour heureux

Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force
Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit
Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix
Et quand il croit serrer son bonheur il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce
Il n'y a pas d'amour heureux

Sa vie Elle ressemble à ces soldats sans armes
Qu'on avait habillés pour un autre destin
À quoi peut leur servir de se lever matin
Eux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertains
Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes
Il n'y a pas d'amour heureux

Mon bel amour mon cher amour ma déchirure
Je te porte dans moi comme un oiseau blessé
Et ceux-là sans savoir nous regardent passer
Répétant après moi les mots que j'ai tressés
Et qui pour tes grands yeux tout aussitôt moururent
Il n'y a pas d'amour heureux

Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard
Que pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unisson
Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson
Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson
Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare
Il n'y a pas d'amour heureux

Louis Aragon

Invité

Très beau poème... D'une profonde mélancolie...

Très beau poème en effet. Il montre une grande sensibilité, j'aime beaucoup. Le dernier paragraphe en particulier est très fort...

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